La question de la transmission de nos savoir-faire et de notre expérience nous semble fondamentale, pour notre métier et l’ensemble des métiers qui participent à la fabrication des films pour le cinéma et l’audiovisuel.
Le métier de scripte demande une formation axée sur la continuité, la vision globale du film, la grammaire cinématographique et toutes ses transgressions. Elle s’accompagne d’une connaissance générale du cinéma et de l’apprentissage de méthodes pour garantir le bon déroulement du récit et de l’écriture cinématographique, le regard spécifique sur le rythme et les morceaux du puzzle qui se construit jour après jour.
Rappelons que notre champ professionnel est essentiellement composé par les fictions : longs-métrages, téléfilms unitaires et séries.
Les scriptes sont rares sur les publicités, sauf projets haut de gamme (souvent confiés à des cinéastes) ou tournés par des réalisateurs anglo-saxons ou si un texte, des rythmes particuliers, des effets ou des exigences de postproduction nous amènent à y exercer nos talents et nos savoir-faire. Les scriptes sont extrêmement rares sur les documentaires, sauf si le travail de « mémoire du tournage » prend une dimension particulière.
Peu d’écoles préparent à ce métier :
Nous ne parlerons pas des formations fantaisistes, voire abusives, offertes par certains organismes ou de celles que l’on peut même trouver sur Internet du genre « Comment devenir scripte en 10 leçons et quelques jours ».
Nous retiendrons donc, pour la formation initiale : la Fémis (quatre étudiants tous les deux ans), l’INSAS (école belge), le CLCF (une quinzaine d’étudiants par an).
Dans le cadre de la formation continue : le CEFPF et l’ESRA (une vingtaine d’étudiants par an) qui proposent des enseignements spécifiques « Initiation au métier de scripte ».
Ces quelques écoles ou organismes offrent à leurs élèves le statut de stagiaire conventionné pour effectuer un stage faisant partie intégrante de leur scolarité. Ce stage est, selon les cas, obligatoire ou non pour la validation de leur diplôme ou de leur formation.
Ainsi nous ne voyons pas dans quels autres cas nous pourrions accueillir un stagiaire conventionné remplissant les critères stricts de la définition légale (voir cadre juridique), à savoir : un stage obligatoire pour l’obtention d’un diplôme ou un stage facultatif lié au cursus de formation suivi. Il s’agirait alors d’un étudiant non destiné au métier de scripte (avec le cas limite des formations universitaires « généralistes » en cinéma) et n’en attendant pas nécessairement l’enseignement, avec donc un effet nul sur la transmission de ce métier.
Nous avons pourtant de belles occasions de répondre à ce désir et d’agir en faveur de la transmission : chaque fois que nous faisons appel à un assistant, poste de plus en plus souvent nécessaire sur les tournages de films, téléfilms et séries.
En voici quelques raisons : double-plateau, seconde équipe, multi-caméra, morcellement de la continuité quand plusieurs épisodes se tournent simultanément, effets spéciaux ou travail de postproduction particulier, réduction du temps de tournage entraînant une accélération des rythmes souvent au détriment du « temps de la mise en scène », parmi bien d’autres exemples…
TRANSMISSION DES SAVOIRS VERS L’ASSISTANT
Dans ces conditions l’assistant devient véritablement le support de la transmission :
- nous allons nous appuyer sur lui pour nous aider à assurer les tâches liées à la complexité du projet ;
- il pourra, le cas échéant, assurer seul la continuité sur une seconde équipe, ou bien poursuivre une série, épaulant ainsi le scripte titulaire suivant, et faire le lien avec l’équipe mise en scène pour l’ensemble de la mémoire de la saison ;
- il devient partie intégrante de notre travail et la transmission de l’expérience se fait avec lui de mille manières différentes, de façon explicite mais également implicite.
Un assistant doit avoir l’occasion de côtoyer plusieurs scriptes et d’expérimenter plusieurs méthodes, plusieurs approches du métier, avant de créer la sienne propre. Il doit donc avoir la possibilité de travailler sur plusieurs projets.
Nous voulons rappeler que l’assistanat est la seule voie possible d’apprentissage pour les candidats hors cursus étudiant (cela arrive encore…). Cette voie d’accès au métier ne doit pas leur être définitivement interdite par le fait du seul recours à des stagiaires sous convention. Le scripte titulaire doit être en mesure de donner cette opportunité à tout autodidacte dans lequel il estime pouvoir mettre sa confiance.
TRANSMISSION DES SAVOIRS VERS LE STAGIAIRE CONVENTIONNÉ
- Un stagiaire conventionné est par définition en cours de formation dans le cadre d’un cursus spécifique de scripte.
Bien que le scripte en titre puisse lui confier des tâches simples, ce stagiaire reste avant tout dans une position d’observateur, ne pouvant être présent que sur une courte période, devant retourner en cours lorsque son cursus ou ses examens l’exigent. Il ne peut en outre, légalement pour les productions, participer au travail de nuit ou en heures supplémentaires.
- Sur les projets tournés en province, la situation devient encore plus critique. Il est pratiquement impossible de trouver des candidats à un stage conventionné de formation initiale ou continue « scripte ».
Il serait absurde et fort dommageable pour tous, professionnels et stagiaires, de prendre à nos cotés quelqu’un qui ignore tout de notre métier, n’aspire pas à le pratiquer et ne se sent donc pas concerné par cet apprentissage spécifique.
EN CONCLUSION
Nous souhaitons assurer la relève de notre métier et sa transmission dans les meilleures conditions possibles par la présence d’un assistant à nos côtés, chaque fois que le scripte titulaire le juge nécessaire.
L’organisation des études des futurs diplômés scriptes nous permet rarement d’accueillir des stagiaires conventionnés dans le cadre juridique légal.
Si stagiaire conventionné il y a, la transmission des savoirs ne peut s’imaginer et se mettre en place que lorsque l’équipe est complète (scripte et assistant éventuel) afin d’en garantir la qualité. Nous en assumerons la responsabilité en assurant le lien avec le stagiaire et avec son responsable d’études, et en veillant à sa réelle autonomie d’étudiant non assujetti aux impératifs du tournage.
Ainsi nous semble-t-il que nous pourrons contribuer au développement du métier de scripte, à sa projection dans le futur, à ses évolutions, qui le rendent si nécessaire, si précieux, si riche et passionnant.